Taux d’intérêt entre entreprises liées: une preuve libre, mais propre à l’emprunteur

L’arrêt du Conseil d’Etat SNC Siblu du 18 mars 2019 apporte un éclairage précieux sur l’application de l’article 212, I a du CGI, qui encadre le taux retenu pour les intérêts versés en entreprises liées.

Dans le cadre du financement d’une opération à effet de levier, une société du groupe avait bénéficié d’avances auprès des deux holdings de reprise, rémunérées au taux annuel de 8,2803%. Le service vérificateur a réintégré une partie de la charge d’intérêt, en appliquant le taux moyen de rémunération consenti par la banque Barclays pour le financement de l’opération d’acquisition. Afin de justifier du taux retenu, la société se prévalait d’une part d’extraits issus d’un article financier et d’un ouvrage. D’autre part, elle soulignait que le contrat de financement conclu avec la banque Barclays l’empêchait d’obtenir tout prêt auprès d’un établissement financier indépendant.

Le Conseil d’Etat rejette le pourvoi de la société, en rappelant que:

La preuve est libre. Néanmoins, les études fournies doivent impérativement correspondre à la situation propre de l’entreprise emprunteuse. A défaut, elles seront écartées par le juge. La mise en œuvre des principes applicables en matière de prix de transfert apparaît donc comme le mode de preuve privilégié pour justifier des conditions d’emprunt comparables à celles du marché. Dès lors, la pratique des services vérificateurs consistant à refuser toute démonstration par recours à des émissions obligataires semble fragilisée.

Le profil de risque financier reflété par le taux d’intérêt est celui de la société emprunteuse. Dans le prolongement de l’arrêt General Electric, le rapporteur public souligne: «le taux de marché doit donc être déterminé principalement au regard de la situation propre de l’emprunteur et non de son appartenance à un groupe». En effet, il n’existe pas de présomption implicite de soutien du groupe.

Par conséquent, l’appréciation du risque de crédit constitue la clef de voûte de la justification d’un taux d’intérêt. Dans cette optique, la note de crédit établie en conformité avec la méthodologie d’une agence de notation et l’estimation de la perte probable en cas de défaut permettent de caractériser ce risque.

A partir des principes applicables en matière de prix de transfert, le recours à des comparables internes et/ou externes doit ensuite permettre d’établir un intervalle de pleine concurrence, aboutissant à la démonstration d’un taux d’intérêt de marché.

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